La dynamique du circuit

Nous terminerons l'analyse du circuit économique par quelques considérations sur sa dynamique à court et long terme. La dynamique à court terme sera abordée à travers les "moteurs de la croissance". Elle sera illustrée par l'évolution de l'économie française. La dynamique à long terme amène à s'interroger sur une question d'importance : au final, et au delà des crises, comment expliquer la croissance continue de l'économie sur longue période ?

L'équation d'équilibre entre ressources et emplois sur biens et services permet de mesurer les facteurs ou moteurs de la croissance (les emplois). L'évolutions des facteurs d'une année sur l'autre permet d'analyser l'évolution de l'économie à court terme. Il est même possible de mesurer la contribution de chaque facteurs à la croissance. Ce sont les deux points fondamentaux de l'analyse conjoncturelle.

Grâce à l'INSEE, on dispose facilement des données sur ces deux points fondamentaux :

• le tableau des Ressources et emplois de biens et services en volume n°1.102P

• le tableau des Contributions à l'évolution du PIB aux prix de l'année précédente n°1.104

Ces tableaux peuvent être téléchargés au format Excel sur le site de l'INSEE (http://www.insee.fr/)

Le premier tableau, présenté ici sous forme graphique, donne pour l'économie française au cours de la période 2000-2006 :

Pour simplifier, les OV, VS et dépenses de consommation finale des institutions sans but lucratif au services des ménages ne figurent pas sur le graphique (montants faibles en valeur absolue).

Alors qu'une reprise s'amorçait depuis 1998-99, on constate que la croissance (PIB) fléchit nettement à partir de 2001-2003. Les moteurs de l'investissement et des exportations s'éteignent. Subsiste seul le moteur de la consommation des ménages et des administrations.

La situation s'explique par le fort ralentissement de la croissance aux Etats-Unis — à partir du 2ème trimestre 2000 et amplifié par les attentats du 11 septembre —  en Allemagne et au Japon. Les trois plus grandes économies de la planète sont en crise, dans un contexte psychologique lourd (terrorisme international). La chute des exportations françaises reflète la déprime du commerce mondial (accentuée par une situation difficile en Amérique Latine) ; l'arrêt des investissements reflète l'incertitude sur l'avenir.

Depuis 2004, la croissance repart doucement, soutenue par des facteurs internes : l'investissement (FBCF) et la consommation des ménages. Le PIB n'arrive toutefois pas à franchir à nouveau la barre des 3 %.

La mesure des contributions des facteurs à la croissance (deuxième tableau), en points de PIB, permet de tenir compte de l'importance des facteurs de la croissance en valeur absolue et de préciser l'analyse :

La reprise en 2004 provient essentiellement de la consommation des ménages (plus de la moitié de la progression du PIB lui est imputable). Les autres moteurs sont ensuite l'investissement puis les variations de stocks (gonflement des stocks) et la consommation des administrations. Le solde extérieur joue négativement (1,0 + (-1,7) = -0,7 points de PIB).

Depuis 2005, la croissance n'est plus tirée que par la consommation des ménages (1,2/2,0 = 60% de la croissance) puis par l'investissement.

Les crises et ralentissements successifs de l'économie masque un phénomène bien réel sur le long terme : une extraordinaire croissance depuis deux siècles. Le PIB français a été multiplié par 17 entre 1785 et 1980, la production par personne au travail par 13, alors que la population active doublait . La courbe de la création de richesses est exponentielle et s'est accélérée au cours des "Trente Glorieuses" (1945-75). Ces données mettent en évidence le phénomène fondamental de gains de productivité.

Mais comment expliquer ces gains de productivité ? Logiquement, les économistes ont cherché à mesurer la contribution des facteurs de production à la productivité. Les résultats sont surprenants et constatés dans tous les pays : plus de la moitié de la croissance ne s'explique pas par le travail et le capital ! Il subsiste un "résidu" mystérieux, inexpliqué...

Depuis, plusieurs facteurs sont avancés pour expliquer la croissance, à côté du rôle des facteurs de production "traditionnels" que sont le travail et le capital :

• le rôle du progrès technique

• le rôle des institutions et de la cohésion sociale

• le rôle d'un mode de régulation cohérent entre demande et offre

• le rôle des externalités positives (croissance endogène)

L'article Croissance économique détaille ces explications et les discute. Mais le lien reste toujours difficile à faire. Depuis peu, le savoir est à son tour désigné comme un facteur-clé, à travers la notion d'économie de la connaissance.

Nous reviendrons sur d'autres explications lors de la partie 2 consacrée aux origines et à la dynamique du capitalisme. Signalons d'emblée que la difficulté d'explication subsiste.