De l'épicier de Landernau au premier distributeur français
Le contexte
Au sortir de la deuxième guerre mondiale les besoins sont énormes mais l'organisation commerciale peine à servir les consommateurs dans des conditions satisfaisantes.
Permettre à chacun de s'offrir ce dont il a besoin au quotidien : une idée simple, conçue suite aux privations et aux spéculations engendrées par la seconde guerre mondiale. Edouard Leclerc va en faire un concept révolutionnaire, en entraînant avec lui d'autres chefs d'entreprise prêts à croiser le fer avec les lobbies et les pouvoirs publics.
Cet extrait du site corporate
du mouvement E. Leclerc[1] exprime clairement un engagement consumériste.
Inspirés par le développement des supermarchés, les commerçants-entrepreneurs vont remettre en question le rôle des intermédiaires du commerce et contester le pouvoir des fabricants.
Les débuts
20 % moins cher !
1949 : Ouverture à Landernau du premier magasin d'Edouard Leclerc avec un capital de 5000 francs [2] soit en euros 2013 : 151€.
La promesse : vendre aux prix de gros en supprimant les intermédiaires.
En réaction aux premiers succès de E. Leclerc, les concurrents tentent de :
montrer qu'ils peuvent aussi baisser leurs prix (ex. les 12000 épiciers de la vidéo ci-dessous) ;
convaincre les industriels de ne pas livrer E. Leclerc ou de lui imposer un prix de vente minimum.

1959 : Quelques chefs d'entreprises suivent la démarche de E. Leclerc pour porter à environ cinquante le nombre de magasins qui s'affichent comme membres du mouvement E. LECLERC.
Le premier centre distributeur E. Leclerc de la région parisienne est inauguré à Issy-les-Moulineaux en novembre 1959. Il est exploité par Jean-Pierre Le Roch.
1960 : La circulaire Fontanet interdit le refus de vente. Dès lors, Edouard Leclerc obtient plus facilement des livraisons des grands fabricants.
A partir de 1960 :
Le format des magasins évolue vers le supermarché puis vers l'ouverture d'hypermarchés
Les centres E. Leclerc adoptent la formule du libre service (1962).
Une croissance marquée par les oppositions et la réglementation des implantations
Le mouvement Leclerc se développe et se structure.
Deux organisations apparaissent :
ACDLec : pilote la stratégie et regroupe les adhérents (propriétaires des magasins) ;
Galec : la centrale d'achat, négocie et organise l'approvisionnement des magasins et des bases régionales.
Elles sont remarquables car une si forte séparation entre le politique (stratégique) et l'opérationnel est plutôt rare. Cette dichotomie sera, plus tard, adoptée par de nombreux réseaux d'indépendants, d'affiliés ou de franchisés.
Pour livrer les points de vente et acheter certaines marchandises des centrales d'achat régionales (SCA), largement indépendantes, sont créées.
Les faits marquants de cette période
1964 - Ouverture du 1er hypermarché de l'enseigne à Landerneau ;
1969 - Suite à un désaccord avec Edouard Leclerc, Jean-Pierre Le Roch et 92 autres adhérents quittent le mouvement pour créer les « EX Offices de distribution » qui deviendront plus tard « Intermarché ».
1974 – Adoption de la loi Royer[4], présentée par certains comme un texte anti-Leclerc.
La bataille pour le droit d'établissement
Les exploitants de « grandes surfaces » commencent à se heurter à une opposition forte du petit commerce indépendant. Parfois les affrontements violents nécessitent une intervention importante des forces de l'ordre comme en 1974 face au CID-UNATI pour la "Bataille de Rochefort".
Le mouvement E. Leclerc renforce alors son discours visant à dénoncer les entraves à la libre concurrence, les monopoles et les privilèges économiques afin de gagner le soutien des consommateurs.
Exemple : Les tensions autour de l'extension d'un centre E. Leclerc : la bataille de Rochefort

En dépit du rejet de sa demande d'autorisation, le propriétaire du centre E. Leclerc de Rochefort poursuit les travaux d'amélioration de son magasin. Des affrontements violents entre les partisans de E. Leclerc et ceux de la défense du commerce indépendant (principalement le CID-UNATI) se déroulent dans les rues de Rochefort.
La naissance d'une enseigne européenne - l'expansion du mouvement Leclerc
1980-1995- La normalisation ?
Dans les années 1980, E. Leclerc engage de nombreuses actions pour pouvoir vendre des produits dont le commerce n'est pas libre comme les carburants, la parapharmacie ou les livres.
1992 - E.LECLERC affiche une ambition internationale en ouvrant un magasin à Pampelune. Source[6]
1993-1994 : Face à la stagnation des supermarchés, l'enseigne se diversifie avec des enseignes spécialisées dans la vente de produits ou services particuliers : produits culturels, bijoux, voyages, ...
1995 : Les premiers magasins E. Leclerc ouvrent en Pologne et au Portugal.
1997 : Création de la filiale SCAMARK qui développe et gère les produits à marque de distributeur du réseau (ex. Marque Repère).
Depuis le milieu des années 90-
Le contexte législatif s'oriente vers plus de réglementation dans deux domaines clés pour l'activité des magasins :
les règles d'urbanisme liées à l'ouverture ou à l'agrandissement des points de vente ;
les relations entre les distributeurs et les fabricants notamment en matière de négociation tarifaire ( Cristofar, 1998[7]).
Ce contexte pénalise particulièrement l'enseigne E. Leclerc dont l'attractivité repose largement sur la promesse de prix bas. Il faut alors trouver de nouveaux axes de différenciation pour se relancer car en 1992, pour la première fois, la part de marché de l'enseigne recule E.Leclerc Histoire et Archives (web)[8].
La loi LME[9] de 2009 marque un tournant car elle allège les procédures administratives nécessaires pour ouvrir, agrandir et moderniser les points de vente.
Disparition d'Edouard Leclerc
Le 17 septembre 2012.
Le mouvement E. Leclerc aujourd'hui
Un réseau dynamique
Le chiffre d'affaires des centres E.Leclerc a progressé de + 7 % (hors carburants) en 2012. Il atteint 32,3 milliards d'euros (hors carburants), dans un contexte de stagnation de la consommation des ménages.
En 2012, l'enseigne comptait 562 magasins – appartenant à 530 adhérents - en France, dont 70% d'hypermarchés. Leur surface comprise entre 2500 et 6000 m2 permet de conserver des points de vente à taille humaine.
Un réseau très diversifié
Les nombreuses enseignes du mouvement E. Leclerc en 2010 :
101 centres L'Auto E.Leclerc
59 Brico E.Leclerc
33 Jardi E.Leclerc
213 Espaces Culturels E.Leclerc
182 Agences E.Leclerc Voyage
277 Le Manège à Bijoux E.Leclerc
63 Optique E.Leclerc
188 Parapharmacies E.Leclerc
95 parfumeries Une heure pour soi
27 Sports et Loisirs E.Leclerc
219 agences Loué chez E.Leclerc
4 espaces Audition E.Leclerc
564 stations services E.Leclerc (dont 10 autoroutières)
source : Le mouvement Leclerc (web)[1]
Il convient d'ajouter environ 400 à 500 magasins en service au volant E. Leclerc Drive (Juillet 2013), mode de distribution pour lequel l'enseigne est le leader du marché français.
Faits marquants de l'actualité
2008 - le retour du discours consumériste dans un contexte économique difficile : « on a tous le droit de ... »
2010 - le mouvement fait partie des leaders du drive. En ouvrant des drive isolés E.Leclerc améliore rapidement son maillage territorial pour capter de nouveaux clients.
2014 - année de la réglementation de l'ouverture des drive.