Les marges bancaires pendant la crise. Patrick Castex, Maître de conférence, Paris Dauphine

5.4 L'évolution des prix et des volumes : l'exemple du PIB et de ses emplois

l'exemple du PIB et ses emplois

  • En toute rigueur, l'indice des prix du PIB n'est pas le même que ceux de la consommation finale, de l'investissement, des importations ou des exportations : les paniers sont différents et les prix des produits les composant n'évoluent pas parallèlement. On en déduit donc pour chaque agrégat l'évolution des volumes. Les graphiques suivants donnent les indices de prix de chaque agrégat en base 100 en 1949 ; par exemple, 100 € de PIB en 1949 valent en 2008 près de 2000 € par le seul effet prix : les prix ont été multipliés par près de 20 et le taux d'inflation annuel selon le PIB est de 5,2 %. Ils indiquent également les indices de volume ; par exemple 100 € de PIB en 1949 valent environ 760 € en 2008 par le seul effet volume : les volumes ont été multipliés par 7,6 et le taux de croissance moyen annuel ressort à 3,5 %.

  • Pour calculer un taux moyen de croissance, on ne peut évidemment pas diviser le pourcentage sur la période par le nombre d'années n (Ce qui donnerait pour le volume du PIB une croissance totale sur la période de 662 % / 59 = 11,2 %. Ce qui est largement faux, on l'a explicité plus haut.). Il suffit de se souvenir que les taux de croissance se cumulent ; si t est le taux recherché, on a, avec Indn l'indice final en année n et Ind0 l'indice initial en année 0 : (1 + t)n = Indn / Ind0. On en déduit 1 + t = (Indn / Ind0)1/n et :

t = (Indn / Ind0)1/n – 1

Ce qui donnerait pour le volume du PIB une croissance totale sur la période de 662 % / 59 = 11,2 %. Ce qui est largement faux, on l'a explicité plus haut.

Pour le PIB en volume, on a obtenu par exemple le taux de croissance moyen annuel :

t = (762 / 100)1/59– 1= 0,035 soit 3,5 %s

  • Et on peut ainsi calculer, sur la période totale et sur les deux périodes considérées, les taux de croissance moyens annuels, en volume, prix et valeur, des différents agrégats biens connus : PIB, CF des ménages (CF M), FBCF, importations (IM) et exportations (EX). Ce tableau inclut un agrégat moins connu : la CF collective « non marchande » (On précisera plus loin sa signification exacte) dite « CF des APU », APU signifiant Administrations publiques. Les graphiques suivants donnent les évolutions en indices volume, prix et valeur de ces différents agrégats (indices 100 en 1949), sur la période 1949-2008, sur celle des « Trente » Glorieuses 1949-1974 et celle des « Trente » années de plomb 1974-2008. Il indique également les taux de croissance moyens annuels correspondants ainsi que les taux de croissance relatifs par rapport au PIB.

  • L'indice de volume des deux CF a en gros suivi celui du PIB, mais il lui est toujours légèrement inférieur. Les courbes d'indice de prix sont à peu près parallèles, sauf celle de la CF APU qui décolle dès le milieu des Trente Glorieuses, prend son envol lors des deux premières crises liées aux deux premiers choc pétrolier et continue sa montée vers le ciel jusqu'en 2008. Cet envol des prix est en fait un envol des coûts...

  • C'est en fait la FBCF qui a tiré le PIB sur les deux périodes, mais avec combien de soubresauts ! Après la forte croissance sur les Trente Glorieuses, c'est la stagnation jusqu'au milieu des années 80, puis un boom jusqu'en 1990 suivi d'un creux lors de la crise de 1993, une remarquable reprise jusqu'en 2008, à peine entamée par le petit creux de 2001-2003 qui a suivi la première crise financière du siècle. L'évolution de l'indice des prix de la FBCF est aussi un peu particulière. Cet indice stagne sur les années 90 (stagnation liée à la stagnation globale en volume sur cette période) puis rattrape en partie son retard (le boom des volumes induit des hausses de prix relatifs). C'est en fait les cycles des investissements qui traduisent le mieux les cycles économiques. Et, répétons-le, contrairement aux idées reçues, la dynamique de l'investissement est brillante depuis la crise de 1993 et singulièrement de 2003 à 2008. (Cette dynamique aura peut-être induit un processus de suraccumulation du capital ; on y reviendra. Il va de soi que l'investissement en FBCF s'écroule par contre en 2009 et, probablement, stagnera en 2010.)

  • Quant aux échanges extérieurs, l'évolution met en relief la forte croissance des volumes : les volumes EX et IM augmentent sur toute la période 4,6 fois plus que le PIB. Le décollage ne date pas de la « mondialisation » (souvent présentée comme un phénomène récent), mais des années 60 ; il est vrai cependant que l'accélération est encore dopée au début des années 90. Par contre, les prix des EX et IM sont toujours à la traîne. À peine note-t-on les effets des deux premiers chocs pétroliers ; et les prix stagnent depuis le contre-choc de 1986. Ils rebondissent cependant depuis le troisième choc pétrolier de 1999 mais auront augmenté depuis 1949 plus de deux fois moins vite que ceux du PIB, surtout pour les EX.

  • L'accélération récente de la mondialisation présente, répétons-le, cette vertu (déjà à l'œuvre depuis le milieu des années 80) pour les biens importés utilisés en France ; bien avant que les projecteurs ne soient braqués sur la Chine et l'Inde, les Dragons et Tigres du Sud-est asiatique étaient en marche. Mais à contrecoups de délocalisations et de pertes d'emplois... Pour les biens exportés, la concurrence devient de plus en plus vive, dopant le dynamisme des entreprises, mais par la recherche à tout prix de la baisse des coûts dont salariaux...La mondialisation est bien présente et prégnante, avec les deux inconvénients précédents....

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