Les effets du “pays d'origine”
L'influence de l'origine d'un produit sur le comportement d'achat occupe la recherche en marketing depuis une quarantaine d'années. Il ne fait aucun doute que le “made in” est susceptible d'influencer le consommateur lors du choix d'un produit. Des études ont montré que les consommateurs sont prêts à payer 30% plus cher un même modèle de voiture s'il est fabriqué aux Etats-Unis au lieu des Philippines (Johansson et Nebenzahl, 1986). Des produits électroménagers de marque allemande ou japonaise perdent 30% à 40% de leur valeur perçue s'ils sont fabriqués en Corée (Jaffé et Nebenzahl, 1989). Plus récemment, il a été montré que la délocalisation de la fabrication et dans une moindre mesure du design des produits de luxe français dans d'autres pays auraient des conséquences négatives considérables (Koromyslov et Walliser, 2011).
Or, l'effet est loin d'être systématique et son ampleur variable selon les situations. L'image du pays d'origine n'est qu'un critère de choix parmi d'autres à influencer la décision du client. Ainsi, la problématique mérite d'être analysée à plusieurs niveaux.
Produits importés par rapport aux produits domestiques
D'abord (cercle concentrique extérieur du schéma), on constate, de manière générale, que dans les pays industrialisés les consommateurs préfèrent des produits locaux aux produits importés. L'inverse est vrai dans les pays en voie de développement, où les consommateurs ont tendance à préférer les produits importés des pays industrialisés aux produits locaux.
Effets du pays d'origine
A un deuxième niveau, on observe que l'effet du pays d'origine varie en fonction de la catégorie de produit et du pays d'origine. Certains produits ont un effet de pays d'origine très marqué et spécifique à un seul pays. Cela est par exemple le cas pour les pâtes – que tout le monde préfère d'origine italienne. Pour le chocolat, une majorité de consommateurs préfèrent le chocolat suisse et une minorité le chocolat belge. Pour les voitures, l'origine idéale est tantôt l'Allemagne, tantôt le Japon.
Autres critères : marque, composantes, étape de la production délocalisée
A un troisième niveau joue également un rôle, pour le client, un ensemble d'autres critères, plus ou moins susceptibles soit de renforcer soit de contrebalancer l'effet du pays d'origine. Ces critères sont : l'étape du processus de production délocalisée (la délocalisation du design est perçue différemment de la délocalisation de la fabrication ou de l'assemblage) ; l'image de la marque du produit ou de l'entreprise (une marque forte comme Sony peut contrebalancer une origine a priori défavorable), le prix, la garantie, etc.
Exemple :
L'image de la SMART est le résultat de l'ensemble des attributs physiques et de service de la SMART, y compris le prix, plus :
- l'image de marque “SMART” ;
- l'image du lieu de fabrication “France” et plus précisément “la Lorraine” ;
- l'image des groupes “Mercedes” et “Swatch” ;
- la perception du pays d'origine idéal pour cette catégorie de produits (voiture de tourisme) ;
- l'origine du client : il évaluera autrement le lieu de fabrication, selon qu'il vienne d'Allemagne (production d'un pays industrialisé voisin), de France (production nationale) ou du Mali (production venant d'un des pays les plus industrialisés du monde) ;
- les critères socio-démographiques et psycho-graphiques du client : âge, niveau de formation, ouverture internationale, etc.
Complément : Voir l'animation : la perception des effets du pays d'origine par le consommateur
Pour simplifier le processus de décision, le consommateur utilise le pays d'origine comme un critère d'évaluation globale (résumé) réduisant le risque perçu d'achat. Il l'utilise comme critère saillant, lorsqu'il a des sentiments forts concernant un pays. L'influence du pays d'origine s'avère particulièrement forte pour des personnes ayant peu voyagé, ayant un niveau de formation faible et étant âgées.
Exemple : Prise de décision en tenant compte de l'origine du produit.
Prenons le cas d'un consommateur français qui souhaite acquérir une voiture de ville. Ayant, a priori, une attitude favorable à l'égard des produits fabriqués en France, il rêve d'une voiture de fabrication allemande mais fait également confiance aux voitures japonaises. Si, de plus, il a une attitude favorable à l'égard de la marque Toyota, il y a toutes les chances que ce client achète une Toyota “Yaris” fabriquée en France. L'exemple peut sembler caricatural, car il laisse de côté d'autres critères d'achat comme le prix de la voiture, ses attributs physiques (motorisation, design, performance) et de service (garantie, intervalle de maintenance). Toutefois, quand le client ne dispose pas de tous ces critères ou dans les cas, nombreux aujourd'hui, de produits peu différenciés, l'origine du produit peut faire la différence.
Les recommandations suivantes découlent des recherches en matière d'effets du pays d'origine :
- un fabricant a intérêt à faire connaître son pays d'origine, si celui-ci est perçu comme favorable pour une catégorie de produits donnée (montres Ebel / Suisse ; pâtes Barilla / Italie) ;
- un fabricant a intérêt à faire connaître son pays de fabrication, si celui-ci est perçu comme favorable pour une catégorie de produits donnée (produits Sony fabriqués en Allemagne) ;
- un fabricant a intérêt à faire oublier son pays d'origine et/ou son pays de production, si ceux-ci sont perçus comme défavorables pour une catégorie de produits donnée (chocolats / Ferrero, Italie / lieu de fabrication en dehors de la Suisse et de la Belgique) et devrait dans un tel cas de figure plutôt insister sur :
le nom de la marque (chocolat Ferrero “Kinderschokolade”) ;
la garantie du produit (voiture coréenne Hyundai garantie 120 000 km) ;
d'autres éléments liés à une origine favorable (mobilier IKEA fabriqué en Chine, mais avec label “Design by IKEA, Sweden”).