Épargne versus monnaie
Monnaie, revenu, patrimoine et épargne sont des notions qu'il est communément difficile de définir. Les théories économiques nous proposent une distinction précise et précieuse.
Définition :
Le ménage reçoit un revenu dit primaire, provenant de la vente de son travail (son salaire) et du patrimoine qu'il détient (les intérêts de ses actifs bancaires et financiers, le loyer de ses biens immobiliers).
Le revenu disponible brut est le revenu primaire augmenté des prestations sociales (retraite, allocations sociales) et diminués des impôts et des cotisations sociales.
L'affectation de ce revenu disponible brut revient au ménage. Trois possibilités s'offrent à lui : consommer immédiatement en achetant des biens et des services, conserver temporairement sous forme d'encaisses en vue d'achats ultérieurs ou se priver durablement de ce revenu en l'épargnant.
Distinction macro-économique monnaie / épargne
Définition : La monnaie
La monnaie est la part du revenu disponible non consommée et non épargnée. Cette somme conservée chez soi dans un bas de laine ou sous le matelas est une perte pour le circuit économique.
Aujourd'hui, avec la bancarisation, la monnaie est conservée dans des comptes bancaires (comptes courants mais aussi comptes réglementés tels que le Livret A, le Compte Epargne Logement). Elle est réinjectée dans le circuit économique par l'intermédiaire des banques.
Ces comptes sont communément considérés comme des produits d'épargne, les conseillers bancaires la qualifient d'ailleurs d'épargne bancaire.
Toutefois, pour les économistes, il s'agit de monnaie (Banque de France Agrégats Monétaires). En effet ses produits ont la particularité d'être liquides (aisément convertibles en monnaie), sans risque et avec un taux d'intérêt faible, fixé et garanti par l'Etat. Leurs caractéristiques les apparentent plus à de la monnaie qu'à des actifs financiers.
Exemple :
En 2012, les ménages français ont privilégié les dépôts sur les comptes réglementés et en particulier sur le Livret A. La collecte s'est élevée à 55 milliards d'euros dont 32,6 milliards pour le seul Livret A (Observatoire de l'épargne réglementée). Cette somme collectée par les banques et reversée ensuite auprès du fonds d'épargne géré par les Caisse des dépôts et consignations à hauteur de 65% pour le livret A et permet le financement de la construction de logements sociaux.
Définition : L'épargne
L'épargne est la partie du revenu disponible dont le détenteur se prive de l'usage pendant un certain temps. La comptabilité nationale distingue l'épargne immobilière investie dans l'immobilier et l'épargne financière placée sur des titres. Nous ne parlerons par la suite que de l'épargne financière. En contrepartie de la privation de l'usage immédiat de son revenu, l'épargnant reçoit un intérêt au prorata du montant cédé, de la durée et du risque du projet financé.
Attention :
En 2012, le taux d'épargne en France s'établissait à 15,6% dont 6,1% en épargne financière et 9,1% en épargne immobilière.
Le taux d'épargne en France est structurellement élevé. Ainsi, aux Etats-Unis, en 2012, le taux était de 3,9%.
La crise a renforcé le taux d'épargne des ménages français soucieux de se constituer une épargne de précaution.
Toutefois, une part croissante de l'épargne est dédiée à l'immobilier et ne contribue donc pas au financement des entreprises ou des Etats.
Remarque :
L'épargne et la monnaie sont des flux, dépendants du revenu reçu, de la politique de redistribution, de la consommation mais aussi des choix en matière d'endettement.
En effet, un ménage peut choisir de s'endetter pour consommer immédiatement. Son revenu disponible se trouve immédiatement augmenté du montant du crédit. Par contre, ses revenus disponibles futurs seront amputés des montants à débourser (remboursement du principal et paiement des intérêts).
Le pays développés qui ont un taux d'épargne faible comme les Etats-Unis sont des pays où l'endettement privé est important.
On retrouve ici l'opposition célèbre entre la vision classique où l'épargne est un préalable à l'investissement et la vision keynésienne où le crédit (la monnaie) permettant la consommation impulse l'investissement.