Perspectives actuelles de l’analyse financière

Description

Ce dernier module conclue sur les débats actuels concernant l'analyse financière. Il ouvre sur des problématiques plus générales, de droit, de politique et d'économie.

Objectifs

Temps de travail
Ce dernier module nécessite 2h de travail.

Plan

8.1 La mise en question de la fonction d’analyste

8.2 L’analyse financière interrogée
8.2.1 Les conflits d’intérêt propres à cette profession
8.2.1.1 Conflits d’intérêt liés à l’appartenance à une organisation financière
8.2.1.2 Nécessité pour disposer d’informations intéressantes de nouer des contacts privilégiés avec les dirigeants des entreprises analysées
8.2.2 Analyse financière et PME

8.3 La régulation du métier d’analyste
8.3.1 L’indépendance
8.3.2 Déontologie

Introduction

L’analyse financière participe à deux fonctions économiques centrales:
Ces fonctions sont essentielles au bon fonctionnement des marchés tant d’un point de vue financier qu’économique. Les abus constatés ces dernières années, particulièrement aux Etats-Unis, ont amené les régulateurs et les organismes d'auto-réglementation (bourses, associations bancaires et associations d’analystes) à réagir vigoureusement afin de restaurer les conditions d’un fonctionnement efficient des marchés.

8.1 La mise en question de la fonction d’analyste

La crise boursière qui a débuté aux Etats-Unis, à l'automne 2000 et le scandale d’Enron ont mis en évidence des dysfonctionnements en nombre limité mais d'une grande gravité dans la gestion de l'information financière de sociétés figurant parmi les plus importantes capitalisations des marchés, et par ricochet dans le mode d'élaboration des recommandations par les analystes des banques d'investissement. Elle a permis de réaliser l'ampleur et la difficulté de la question des conflits d'intérêts et de leur bonne gestion au sein des banques d'investissement multi capacitaires. En 2002, la loi Sarbanes-Oxley et Regulation Fair Disclosure de la SEC sont venus réglementés ces activités.

En Europe, des problématiques similaires sont apparues. Il est apparu urgent de réglementer cette profession qui en quelques décennies est devenue un acteur important des marchés financiers et de l’orientation de l’épargne. En France, la loi sur la Sécurité Financière en 2003, le code de Déontologie de la SFAF, le règlement général de l’AMF ont cherché à pallier certains problèmes.
Ce dernier chapitre sera l’occasion de faire le point les principales critiques faites contre cette profession et les mesures (en discussion ou déjà appliquées) envisagées pour réguler ces dysfonctionnements.

8.2 L’analyse financière interrogée

Cette présentation s’appuie sur le rapport sur le rapport de l’AMF, Pour un nouvel essor de l'analyse financière indépendante sur le marché français, Groupe de travail présidé par Jean de Demandolx Dedons, juillet 2005, http://www.amf-france.org/documents/general/6158_1.pdf

8.2.1 Les conflits d’intérêts propres à cette profession

8.2.1.1 Conflits d’intérêt liés à l’appartenance à une organisation financière

L'analyste au service d'une banque multi capacitaire peut être en conflit d'intérêts avec l'activité de banque d’investissement, et plus généralement avec tous les départements de sa banque en relation avec les sociétés cotées. Ce cas se présente notamment lorsque le département marché primaire de la même institution monte une opération financière telle qu’une introduction en bourse ou une augmentation de capital.

Du fait de la pression exercée par la clientèle institutionnelle sur les courtages, les sociétés de bourse peuvent être conduites à donner à leurs analystes des missions commerciales élargies par rapport à un modèle d’organisation séparant les équipes d’analystes des équipes de vendeurs. Ce mouvement a été permis par le développement de la technologie, notamment les bases de données informatisées, qui ont eu pour effet de réduire le temps unitaire nécessaire à la réalisation d’une étude fondamentale. Selon les sociétés de bourse, le rapprochement des équipes d’analystes et de vendeurs est plus ou moins accentué, le poids relatif de la dimension commerciale dans le travail de l’analyste plus ou moins lourd. Les dirigeants des sociétés de bourse sont naturellement sensibles au volume des courtages générés grâce au travail des analystes, relayé par celui des vendeurs. Cette attitude peut conduire certains à privilégier la préoccupation de rentabilité aux dépens de la qualité à long terme de l’analyse. A l’opposé, certains dirigeants peuvent également estimer que leur principale valeur ajoutée est aujourd’hui plus dans la qualité des analyses fondamentales produites.

De plus, les analystes des sociétés de bourse sont l’objet périodique, selon un rythme généralement semestriel, de notations détaillées de la part de leurs clients institutionnels, portant entre autres sur la qualité des analyses fournies. Dans l’évaluation globale d’un analyste par son employeur, la reconnaissance de cet analyste par les investisseurs est prise en considération. Cette reconnaissance a une traduction dans le volume des courtages liés aux transactions sur les sociétés suivies ou dans le nombre de rencontres organisées par la société de bourse avec les investisseurs, pour le compte des sociétés cotées. Ces dernières confient l’organisation de telles rencontres à une société de bourse, pour autant qu’elles estiment que l'analyste a bien compris leur fonctionnement et leurs orientations.

Les conflits d’intérêts, évoqués ci-dessus, au sein de la banque d’investissement ou l’accentuation des contraintes commerciales dans le métier de l’analyste d'une société de bourse, proviennent largement du fait que des activités potentiellement en conflit sont développées au sein d’une entité commune.

8.2.1.2 Nécessité pour disposer d’informations intéressantes de nouer des contacts privilégiés avec les dirigeants des entreprises analysées

L’analyste lui même, dans ses relations avec les entreprises, est confronté à des intérêts contradictoires.
L'analyste doit développer une analyse de qualité, mais il dépend, pour ce faire, des informations qui lui sont apportées par les sociétés cotées. De même, dans son rôle qui consiste à mettre en relation émetteurs et sociétés de gestion, l’analyste dépend de la coopération que veulent bien lui apporter lesdites sociétés cotées.
Le risque est, pour un analyste n’étant pas en bonne entente avec une société, que cette dernière répugne à lui apporter son concours, le privant d’un accès à des informations données à d’autres analystes concurrents. A l’inverse, il est légitime pour une société cotée d’être attentive à ce qui est écrit à son propos, en particulier à l’exactitude des faits et chiffres qui sont rapportés.

8.2.2 Analyse financière et PME

La couverture de la cote et des investisseurs par les analystes est très inégalement assurée. L'analyse financière est fortement concentrée sur les grandes capitalisations.

La tendance générale va vers une diminution du nombre de valeurs couvertes par les analystes avec une concentration de plus en plus forte sur les grandes capitalisations.
- En France, 367 sociétés étaient couvertes en 2004 contre 528 en 2001.
- Le même constat a été effectué sur le marché américain où à l'heure actuelle, 50% des sociétés américaines cotées ne seraient couvertes que par deux analystes financiers, et le tiers d'entre elles ne seraient pas du tout suivies. Depuis janvier 2002, 691 auraient ainsi perdu leur couverture par des analystes, représentant 17% de l'ensemble des sociétés suivies.

La couverture par les analystes « sell-side » des moyennes et petites capitalisations se caractérise par une rareté particulière, eu égard au nombre d’entreprises susceptibles d’être étudiées. Un rapprochement des données disponibles avec celles d'Euronext démontre qu'au 31/12/2003, sur les 153 sociétés françaises classées dans le segment B d'Eurolist (capitalisation boursière inférieure à 1 milliard d'euros) 118 d'entre elles faisaient l'objet d'une couverture par au moins un analyste et 35 sociétés ne qui comptait 443 sociétés françaises, est le plus mal loti : 271 n'étaient suivies par aucun analyste. L'offre est d'autant plus difficile à maintenir en ce domaine que la demande de la part des investisseurs peut être très variable. Pour les petites ou moyennes capitalisations, dont le marché est étroit et les titres de faible liquidité, les sociétés de gestion s’efforcent en effet, elles -mêmes, de suivre ces sociétés, sans par conséquent recourir à des analyses largement diffusées. Les grandes sociétés de gestion et les investisseurs, ne spécialisent que rarement des analystes « buy-side » sur les petites ou moyennes capitalisations, mais développent plutôt un modèle de gérants -analystes pour lesquels les contacts avec les émetteurs de petite ou moyenne taille sont essentiels.
Certains bureaux d’analyse ont tout de même développé leur recherche sur ce type de sociétés. Ainsi, sur les 545 analystes « sell-side » recensés, 101 déclarent travailler exclusivement ou partiellement sur des moyennes ou petites capitalisations, soit moins de 20% de l’ensemble des analystes.

Les PME-PMI, privées de l’attention des analystes financiers, ne sont pas en mesure d’attirer les investisseurs institutionnels. Il importe donc de remédier à ce dysfonctionnement afin d’assurer ces canaux de financement qui drainent des montants considérables.

8.3 La régulation du métier d’analyste

8.3.1 L’indépendance

Les recommandations visent à assurer l’indépendance réelle des analystes, aussi bien vis-à-vis de leur propre organisation, avec la constitution d’une réelle « muraille de Chine » entre les différents services, que des compagnies analysées.
Une façon d’obliger l’analyste à émettre des conseils de qualité, non biaisés, serait d’adosser sa rémunération à la justesse des recommandations fournies.

8.3.2 Déontologie

La SFAF a établi un certain nombre de règles auxquelles l’analyste s’engage afin de garantir une totale impartialité de ses conseils.

Mais, la question de la faible représentation des petites capitalisations analysées n’a pas pour l’instant fait l’objet de recommandation particulière.

Conclusion

Le métier d'analyste financier a considérablement évolué, à la suite de la Bulle Internet et des différents scandales qui ont ébranlé le monde économique (affaires Enron, Parmalat, Wordlcom,....).
Aujourd'hui, on assiste encore à une évolution avec la prise en compte de critères non financiers dans l'évaluation. Le développement durable, l'engagement citoyen, la responsabilité sociale des entreprises font l'objet de notation et influencent les jugements émis des analystes.

A retenir